Les premières constructions à structures de bois remontent à l'édification des huttes néolithiques dont on retrouve quelques traces en Alsace.
La maison à colombage date du Moyen-Âge. Malheureusement les vicissitudes de cette époque font qu'il ne reste plus guère de maisons datant d'avant le XVème siècle. Quelques gravures nous montrent des maisons de petite taille, très basses, massives plus larges que hautes, au poutrage et aux pièces de bois rudimentaires, sans préoccupation esthétique. Les fenêtres sont petites et carrées, souvent sans allège. Les toits à deux versants sont sans abattant.
Peinture murale d'un paysage urbain vers 1480
La maison dite « médiévale » est une autre évolution de l'architecture primitive. Un énorme progrès est réalisé grâce à la technique dite "des bois longs" en vigueur jusque vers le XVIème siècle : les poteaux corniers sont d'un seul tenant et sans poteau de faîtage.
Cette époque se caractérise par des assemblages à mi-bois. Les pièces horizontales s'y assemblent par tenons et mortaises.
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mi-bois | tenon mortaise |
Cependant la technique a ses limites. Elle ne s'adapte pas aux constructions en ville où l'on travaille en hauteur, ni à celles en encorbellement, pratiques dans les espaces réduits.
Au XVIème siècle , dans les villes et le vignoble, l'apparition d'une nouvelle technique d'assemblage des pans de bois "les Bois courts" facilite la mise en place de l'ossature.
Les poteaux corniers sont interrompus au niveau de chaque étage par des sablières d'étage, avec lesquelles ils sont assemblés. Les poteaux et les sablières constituent le cadre. Les poteaux intermédiaires (montants) servent de support aux huisseries (fenêtres, portes) et les pièces obliques (décharges) assurent la triangulation qui garantit la rigidité. Enfin des entretoises horizontales servant d'appuis et de linteaux aux fenêtres verrouillent solidement l'ensemble à chaque étage.
Grâce à ce vaste jeu de construction la maison acquiert légéreté et solidité. Les toits sont tous à deux versants (à bâtière) ou (Sàtteldach) et ne comportent pas d'abattant.
Le faîtage est fréquemment coupé en ses deux extrémités pour former des croupes (Wàlm) comprenant une dizaine de rangs de tuiles. Des auvents protégent certaines parties des façades.
Balcons et loggias font leur apparition au sommet du pignon. Les balcons à galeries ornent le mur gouttereau donnant sur la cour.
Le décor est peu abondant. On voit cependant apparaître, intégrés au poutrage des losanges, des losanges barrés d'une croix de Saint André, des chaises curules.
Les inscriptions se limitent à une date, accompagnée parfois des initiales du couple constructeur.
Dans les villes du vignoble et sur les maisons bourgeoises, le décor est, dès cette époque, plus riche.
A partir du XVIIIème siècle, la maison alsacienne traditionnelle est à son apogée. Plus spacieuse, mieux aménagée, elle bénéficie de techniques nouvelles, apportées par les immigrés, notamment les Suisses, dont les célèbres charpentiers de la famille "Schini" installés à Zutzendorf en Pays de Hanau.
La méthode de construction reste celle des "bois courts", mais la disposition du poutrage n'est plus seulement fonctionnelle et solide, elle allie un souci d'esthétique et d'élégance. Les fenêtres plus hautes que larges donnent une allutre élancée aux habitations. On emploie de plus en plus de poutres moulurées et la figure du "Mann" apparaît.
La fausse-croupe se réduit jusqu'à ne plus compter que 4 à 6 rangs de tuiles. Deux ou trois auvents superposés font souvent le tour complet de la maison protègeant les ouvertures et les façades contre les intempéries.
Le toit "à la Mansart" - de Jules Hardouin Mansart - coiffe les presbytères et certaines maisons bourgeoises.
Les garde-corps des balcons sont ornés de balustres tournées ou sculptées de style Louis XIV ou Louis XVI, croix de saint André ou losanges barrés. Sur les maisons "Schini", on trouve deux balcons superposés, aux balustres sculptés très rapprochés, ornant le pignon sur rue.
balustres Louis XIV | balustres tournées |
Les inscriptions gravées sur le poteau cornier ou la sablière d'étage sont plus longues. Le nom du couple constructeur y figure désormais en toutes lettres. Il est souvent accompagné de symboles divers : emblèmes religieux ou porte-bonheur, outils professionnels.
Le style du XIXème siècle se caractérise par son élégance, les dimensions des cours et le luxe du décor en pierre de taille du portail. L'édification de maison à colombage est stoppée avec l'apparition de la mode de construction en pierre ou brique vers 1870. En même temps, dans un souci de modernisation et pour ne plus les faire ressembler à des "maisons de paysans", les façades sont crépies. Bien des colombages sont donc entaillés, recouvert de treillis de fils de fer ou de véritables armatures de clous pour faire tenir le crépis.
Toujours à forte pente, la forme des toits évolue en fonction des époques.
Le matériau de couverture change également.
Les couvertures en chaume des maisons étaient autrefois très répandues dans toute l'Alsace. Elles etaient encore présentes dans le massif vosgien jusqu'au début du XXe siècle
Vallée de la Bruche
Cet isolant thermique, très bon marché, a dû son maintien au niveau de vie peu élevé des occupants. L'habitabilité du grenier et les risques d'incendie font que ces modestes chaumières possédaient un conduit de cheminée bien avant les maisons au toit couvert de tuiles.
A la Renaissance, les toits sont tous à deux versants "à bâtière", (Satteldach) et ne comportent pas d'abattants. Ils sont très inclinés (40 à 60%) afin d'évacuer rapidement l'eau de pluie.
A partir du XVIIème siècle, le faîtage est fréquemment coupé aux deux extrémités. On ajoute un triangle de toit au sommet du pignon pour former de vastes croupes (Walme).
Un égout de toit est réalisé soit par trois rangs de tuiles superposées ou par un coyau pour réduire la vitesse d'écoulement des eaux de pluies et pour éviter leur ruissellement sur les murs. Une pièce de bois biseautée est placée sur la partie base du chevron afin de réduire la pente d'une toiture.
En raison d'incendies fréquents, les propriétaires sont incités à couvrir le toit de leur maison de tuiles. Celles-ci sont plates, en terre cuite, à extrémité arrondie en queue de castor d'où leur nom : Biberschwanz.
Elles ont une surface extérieure légèrement bombée.
Cependant dans certaines villes comme à Wissembourg ainsi que dans le Sungau, les toits sont couverts de tuiles à l'extrémité en pointe dites "fer de lance".
Au XVIIIème siècle, la fausse croupe se réduit jusqu'à ne plus compter que 4 à 6 rangs de tuiles.
Dés le XVIIIème siècle, certaines grandes maisons bourgeoises ainsi que des bâtiments officiels, relais de poste, presbytères possèdent un toit "à la Mansart" avec quatre versants brisés très raides à l'endroit des combles.
Façonnées à la main, les tuiles anciennes présentent des stries longitudinales pour facilité l'écoulement de la pluie. La dimension des tuiles peut varier de 12 à 20 centimètres en largeur et de 24 à 28 centimètres en longueur.
La pose se fait de trois manières différentes :
Sur les anciennes toitures on peut trouver des tuiles décorées. Ce sont souvent des tuiles de fin de journée (Fihrhowezijel) :
Les tuiles portent aussi fréquemment des motifs religieux : croix, trigramme christique « IHS », coeur planté des clous de la passion ou porte-bonheur comme l'arbre de vie, le soleil irradiant, le triangle équilatéral afin de protéger la maison contre les influences malfaisantes, la grêle et la foudre, en la plaçant sous la protection divine.
Les tuiles faîtières sont scellées au mortier, de même que celles couvrant les arêtiers.
L'extrémité du faîtage peut comporter certains ornements : un épi en terre cuite, une boule en cuivre surmontée d'une pointe, une girouette (Watterfahnel) ou un drapeau pour indiquer la direction du vent), parfois un coeur en terre cuite ou une bouteille protectrice, voire une figurine en terre cuite (coq ou autre animal, destinée à veiller sur la maison).
La joubarbe (Dàchwurzel) avait un rôle de protecteur contre la foudre...
La première chose qui nous interpelle sur nos maisons anciennes, c'est l'incroyable diversité et richesse du colombage, le soin apporté à l'harmonie, au décor ainsi que le retour très fréquent à une grammaire symbolique.
Lorsqu'un motif ornemental est fréquemment répété, il finit par attirer l'attention, et on en vient toujours à se poser cette question : cela a-t-il une signification ?
On peut se demander s'il convient de rechercher un symbolisme et un sens profond à chaque détail de nos maisons. Ce ne serait ni réaliste ni raisonnable. En effet, à partir de la fin du XVIIIème siècle, la signification symbolique du décor s'est estompée petit à petit, au profit de la seule fonction ornementale. L'esprit s'est perdu, et l'on n'a plus conservé que la lettre.
Jusqu'au XVIIIème siècle, en Alsace comme ailleurs, les masses populaires sont peu instruites et illettrées. On a donc recours à un langage imagé compris par tout le monde. L'église l'a compris en premier, en recouvrant de sculptures les églises romanes puis les cathédrales gothiques.
Ce furent les bandes dessinées de l'époque. Les décors de pan de bois de nos maisons à colombage eurent la même fonction. La maison Kammerzell à Strasbourg en est un exemple particulièrement éloquent.
La maison alsacienne traditionnelle est un remarquable livre d'images pour qui sait le déchiffrer.
Le poteau cornier ou Eckpfoschte, est une pièce maitresse de la structure de la maison à pan de bois.
A l'origine, il était réalisé d'une seule pièce du sol au toît (bois long). Il est situé à l'extérieur dans l'angle formé par le pignon sur rue et le mur gouttereau donnant sur la cour.
A l'intérieur, cet emplacement correspond au ''coin du Bon Dieu'' (Herrgottwenkel), où sont conservés ou fixés au mur, les objets de piété familiale, souvent dans l'encoignure.
Cette poutre angulaire symbolisait à la fois la propriété et le soutien de la demeure paysanne. Il n'est donc pas étonnant que cette pièce de bois, située à un emplacement stratégique, soit fréquemment dotée d'inscriptions côté rue : date de construction, inscriptions patronymiques, symboles chrétiens, emblèmes et inscriptions ayant un rapport étroit avec la vie professionnelle et affective du propriétaire. Le nom de l'épouse est souvent féminisé, et se termine par le suffixe "in".
Ci-dessous: Richert devient Richertin ou Richertininin.
1566 | 1693 | "Geudertheimer Evangelisches Schulhaus / Anno 1759 / Georg Kieffer Schultheis / Diebold Klein Bürgermeister / Iohanniclaus Strohschneider als Zimmermeister / Michael CE..RO... .. ES... NI.. " soit : « École protestante de Geudertheim / Année 1759 / Georg Kieffer prévôt / Diebold Klein bourgmestre / Johann Niclaus Strohschneider (fut le) charpentier / Michael… »
| Cette maison a été construite par Michel Moritz et son épouse Anna Barbara Richert (inin), Zutzendorf année 1782 |
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1628, colone à vis ou vis de feu (Fihrschrüb). Représentant le feu, elle est interprété comme une protection contre les incendies. | 1655, emblème de charpentier | 1803, emblème de charron | 1848, Michel Geiser et Thérèse Schall en l'an 1848 |
Ces ornements étaient entaillés à la gouge (Kerbschnitt), et le creux de ces entailles, était souvent relevé en blanc ou en couleur.
Ceci en Basse-Alsace. En effet, dans le Sundgau, ce n'est pas le poteau cornier qui sert de support à ces inscriptions, mais la sablière d'étage.
A l'époque romaine, l'historien latin Tacite (55 - 120 après JC), écrivait déjà dans un petit ouvrage (rédigé en l'an 98), et intitulé "Sur l'origine et le pays des Germains'', quelques lignes à propos de nos ancêtres : « Sur certaines parties de leurs maisons, ils (les Germains) appliquent avec grand soin de la terre très fine et lumineuse dans laquelle ils tracent des dessins et des lignes ».
Cette coutume très ancienne, s'est maintenue tout en évoluant. Dans le Pays de Hanau, sur certaines fermes, le crépi était orné de décors gravés (Kratzputz), d'inscriptions et de peintures polychromes (Wandmolerei), ou encore de dessins réalisés à la peinture blanche (Putzmolerei), sur le crépi laissé à l'état naturel.
Hélas, compte tenu de leur fragilité, ces différents décors ont fortement souffert des outrages du temps et des intempéries (pluie, humidité, délabrement du crépi), et sont donc rarement parvenus jusqu'à nous.
L'usage d'orner nos façades de graffiti semble s'être perdu au fil des siècles. Il était revenu à la mode et pratiqué vers 1830 par des artistes anonymes, peut-être ambulants. Le maçon qui appliquait le crépi, grattait dans l'enduit encore frais des dessins gravés, et les rehaussait de peinture blanche à la chaux.
Parmi les figures les plus fréquentes, on peut citer le coq, les poules, les fleurs stylisées, les étoiles, les cœurs percés ou non de flèches, des ostensoirs, des sigles « IHS » etc...
Vu la date tardive de ce genre de décor (début du XIXe siècle), il faut sans doute ne plus voir dans ces dessins, autre chose que des dessins naïfs, mais non moins charmants.
Les panneaux crépis entre le colombage étaient souvent peints, surtout sur les riches demeures urbaines.
En milieu rural, on rencontrait fréquemment des fleurs stylisées, des animaux, des personnages militaires ou civils, ainsi que des inscriptions.
Le contenu des inscriptions pouvait-être :
Les motifs représentés, étaient tous éxécutés avec de la peinture polychrome. Les inscriptions étaient autant réalisées dans les villages catholiques que dans les villages protestants.
Le décor n'était pas toujours gravé dans le crépi, mais parfois seulement peint au badigeon blanc. Ces décors étaient souvent réalisés dans des endroits non visibles de la rue.
Les motifs sont à caractère symbolique, protecteur, ou talismanique. Ils représentaient souvent des arbres de vie, des losanges, des demi-cercles ou des pastilles qui symbolisent le disque solaire.
Au XVIIIème siècle, les inscriptions murales étaient forts courantes en milieu rural.
Les textes étaient humoristiques ou sarcastiques avec des règlements de compte. Les peintres inscrivaient également des versets qu'ils copiaient au hasard de leurs découvertes.
Ils se servaient également de feuilles volantes imprimées par Wenzel à Wissembourg. Ces feuillets, qu'on appelait «Das Goldene ABC» (l'ABC doré), étaient des répertoires de versets qu'on copiait tel quel, ou que l'on adaptait aux circonstances.
Qui mieux que le docteur Auguste KASSEL pouvait en parler!
En effet, médecin de campagne à Hochfelden vers la fin du XIXème siècle, il fut un collecteur infatigable des arts et traditions populaires du Pays de Hanau. Il mit à profit ses visites aux malades pour recenser entre 1890 et 1900 toutes les inscriptions murales existant encore à l'époque. Dans un recueil paru en 1905 (Inschriften im Elsass), il nota toutes les inscriptions extérieures et intérieures des maisons de la région. Il en compta environ 460 !!! Son intérêt pour les arts et traditions populaires se résume dans la préface de son recueil :
"Meinem Lieben Alten Hanauerland, in Ergebenheit und Verehrung gewidmet"
"Dédié à mon cher vieux Pays de Hanau, avec dévouement et respect".
Voici quelques extraits de son ouvrage :
« Il est remarquable de constater que de telles inscriptions exposées aux intempéries durant des siècles, soient parvenues jusqu'à nous.
D'une manière générale, l'écriture est en allemand. On rencontre rarement des inscriptions en français. Sur les anciennes inscriptions, il n'y a pas d'espace entre les mots, ni de ponctuation en fin de ligne. Il est fréquent que la manière d'écrire soit dialectale et incorrecte.
Les maisons aux peintures murales attirent l'attention et la curiosité des étrangers. Même la troupe est littéralement hypnotisée pas ces inscriptions, ce qui provoque régulièrement des arrêts lors des marches de manœuvre ».
Rede wenig mache wahr, Borg wenig bezah le bahr, Lass einen reden wer er ist, So bleibst du auch wer du bist. | Parle peu, soit sincère (honnête) |
Schau auf dich und nicht auf mich. Thu ich unrecht, so hute dich, dann glügselig ist der mann Der sich vor schaden wahren kann. | Regarde toi et pas sur moi (ne prend pas exemple sur moi) |
Die Arbeit ist des Menschen Pflicht den Träge had den se- gen gotes nichd | Le travail est le devoir de l'homme |
O, ich alter Aff'! steh hier her und gaff! während ich hier steh und gaff' könnt ich weiter gehn ich Aff! | Oh moi vieux singe |
Mein Gott die Arbeit meiner hän- de fang ich in deinem Na- men an Gib das ich all- so bollende damit sie dir gefallen tann. | Le travail de mes mains, je le commence |
Alles ist an Gottes Segen vas wir immer thun gelegen die Arbeit ist des Menschen Pflicht der dräge hat Gottes Segen nicht | Rien ne réussit, ni ne prospère |
Ich kam einst in ein Fremdes Land da stehts geschrieben an der Wand bleib verschwiegen was nicht dein ist das lass liegen. | Je m'en vins jadis dans un pays étranger |
Das Wein trinken macht Fröhlich Gott fürch- ten macht Selich Fürchte Gott und trinke Wein so kanst du Fröhlich und Selich sein | Boire du vin donne humeur gaie |
Wenn sis Fried lich einnander le- ben Wird Gottes Segen um sie schweben denn es liegt das Glück der Zeit nur in der Zufriedenheit | S'ils vivent ensemble dans la paix |
En milieu citadin, les inscriptions murales étaient nombreuses et forts prisées. Hélas, elles disparurent au fil des siècles, victimes des intempéries et de l'évolution des mentalités. Il n'en reste que peut de vestige.
Pavillon tardif (1547) de l'ancienne commanderie de Saint-Jean, Strasbourg, actuellement ENA.
Ancien hôtel des Boecklin de Boecklinsau (1598)
Le décor de 1598 représentait l'aigle impérial du Saint Empire Romain Germanique, et les blasons des empereurs.
Strasbourg, place Saint Etienne, actuellement Foyer de l'Etudiant Catholique (FEC). Photo prise avant 1900.
Brasserie ‘'Au Géant'' (1636), installée dans un immeuble de 1541. Démoli pour permettre l'agrandissement de la Manufacture des Tabacs de la Krutenau à Strasbourg. Cette vue a été prise par Charles Winter lors de sa démolition en 1855.
Bierhaus wird zum Riesen genand | Moi, l'auberge surnommée au ''Géant'' |
Ancienne boulangerie située à l'angle de la place Broglie et la rue de la Fonderie à Strasbourg. Photo prise vers 1900.
Une partie du décor sur la façade datait de 1634. Il représentait les armes de la corporation des Boulangers (l'écusson à deux bretzels et deux lions debout sous une couronne), ainsi que de belles décorations polychromes et un verset d'imploration : ‘'Gott halt in Gnaden treue Wacht - In diesem Haus Tag und Nacht'' (Que Dieu veille sur cette demeure nuit et jour).
Les plus anciennes étoiles sont attestées en Mésopotamie vers 3000 av. JC. Elles sont souvent présentes sur nos maisons traditionnelles.
- L'étoile à 5 branches ‘'pentagramme ou pentacle'' (étoile de Salomon), rappelle par sa disposition, la silhouette d'un homme, pieds et jambes écartés. Elle représente en général, les 5 éléments, la terre, l'air, l'eau, le feu et l'esprit.
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Pour les chrétiens, 5 est le chiffre qui rappelle les plaies du Christ. Pour les anciens, le 5 est un accord entre le 3 qui signifie le principe mâle, et le 2 qui correspond au principe féminin. L'étoile à 5 branches, symbolise donc le mariage, l'union et le bonheur dans la vie conjugale. Mais dans les croyances populaires, le pentacle qu'on appelle ‘'Drudenfüss'', est aussi un puissant moyen pour conjurer le mauvais sort. C'est un emblème protecteur contre les esprits malfaisants.
- L'étoile à 6 branches ‘'Hexagramme'' (sceau de Salomon ou bouclier de Davis), était déjà fréquente dans le monde antique.
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Constantin Ier, empereur de 306 à 337. Etandard (Labarum). | Magnance, empereur de 306 à 337 |
Dans la bible, le chiffre 6 a un sens d'œuvre achevée (les six jours de la création). Il n'est pas sans rappeler, le monogramme du Christ (lettre grecques rho et xsi superposées).
L'étoile à 6 branches, est formée de 2 triangles équilatéraux opposés, et sert également comme emblème judaïque, dite étoile de David. Autrefois, on nommait aussi cette étoile ‘'étoile des Brasseurs''. Elle représentait les 6 phases de fabrication de la bière: Elle était sur les enseignes et couramment gravée sur les choppes de bière réalisées à Betschdorf.
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C'est également un symbole bénéfique de plénitude.
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- L'étoile à huit branches, dans la plupart des civilisations, représente un astre (lune, soleil, planète, étoile, comète, etc). Elle combine la croix verticale, symbole chrétien, avec la croix couchée de Saint-André, symbole de fécondité auquel peut se joindre le cercle qui est la représentation du soleil. L'étoile à huit branches est formée de deux étoiles à quatre branches entrelacées.
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Du fait de cette construction, sa symbolique reprend celle de l'étoile à quatre branches, qu'elle double. L'étoile à quatre branches représente les quatre éléments (eau, feu, terre, air) ; l'étoile à huit branches représente en plus les quatre mélanges qui peuvent se faire entre ces éléments premiers. L'étoile à quatre branches représente également les quatre point cardinaux, et l'étoile à huit branches les directions intermédiaires : nord-ouest, nord-est, sud-ouest, sud-est.
Le losange ou Raute est le décor le plus simple et le plus répandu à travers toute l'alsace, mais tout particulièrement dans le Kochersberg, l'Outre-Forêt et le pays de Hanau. Nous le retrouvons partout, aussi bien sur des allèges de fenêtres, sur les murs des étables et des granges, sur les portails, sur les vantaux des portes d'entrée et même dans le décor du mobilier polychrome.
Alors, pur hasard ou signification symbolique?
Sans vouloir voir du symbolisme partout, nous pencherons pour la deuxième proposition. En effet, s'il participe avec le reste du colombage à la rigidité de l'ensemble d'un pan de bois, il faisait partie à l'origine d'un très ancien alphabet scandinave datant du début de l'ère chrétienne, appelé alphabet runique.
Le losange ‘'Ingwaz ou Ing'' était la rune de la fertilité et de la fécondité.
Dans la symbolique traditionnelle indo-européenne, le losange est un symbole féminin. Il représente le sein ou la matrice maternelle. Il désigne un contenu que l'on veut protéger, et est interprété comme un symbole de fécondité. Les mathématiciens modernes ont repris le même signe du losange sur les calculatrices modernes, avec la même signification : un sous-total à préserver.
il est donc représenté pour demander une descendance importante. Mettre un losange sur sa maison, de préférence sur l'allège de fenêtre à l'étage, signifie que l'on souhaite une descendance mâle pour assurer la pérennité de l'exploitation.
En mettre sur son étable, exprime l'espoir d'avoir de nombreux veaux. De même, un losange sur la grange, signifie que l'on espère y engranger des moissons importantes.
La croix de Saint André est une des formes géométriques les plus simples.
Elle se rencontre sur les colombages à travers toute l'Alsace comme par ailleurs dans d'autres régions de France.
Elle consiste en deux pièces de bois croisés ou perpendiculaires l'une par rapport à l'autre, assemblées à mis bois et consolidées par une cheville. De par ses éléments en biais, elle contribue bien entendu à renforcer la structure du pan de bois. Son caractère ornemental est également symbolique.
Il est avant tout un signe de multiplication, comme en mathématique, donc de fécondité, appelant une descendance nombreuse, hommes ou bêtes, sur la maison qu'elle orne. Si elle est étirée en hauteur, on l'appelle Andréaskritz, si elle s'écrase horizontalement, on la nomme Hosanna.
Les croix de Saint André peuvent être doubles ou triple. La double croix de Saint André est fréquente sur les vœux et cadeaux de mariage, il sert alors de symbole à l'union de deux êtres.
C'est dans la combinaison du losange et de la croix de Saint André, "durchkreutze Raute", ainsi que dans la multitude de ces variantes, que le charpentier alsacien a pu exprimer au mieux son imagination et sa virtuosité technique.
Loin de se contredire, les deux signes se renforcent. Le X de la multiplication ajouté au losange, symbole de fécondité, indique que l'on appelle sur la maison une descendance nombreuse et multiple.
Connaissant l'importance, pour un paysan d'un nombreux cheptel, on ne s'étonnera donc pas de retrouver des losanges barrés de la croix de Saint André sur les étables.
De nombreuses variantes de losanges barrés de croix de Saint André existent. Elles n'altèrent en rien leurs sens symboliques, mais ont été réalisées dans un but uniquement esthétique.
Rare et inhabituel, le losange barré d'une diagonale mérite de ne pas être passé sous silence. Cette figure symbolise l'union charnelle de l'homme et de la femme.
A l'époque romaine, la curula était un siège pliable en ivoire soutenu par quatre pieds incurvés.
Elle était l'insigne de la fonction, réservé aux magistrats.
Claude 41-42 ap. JC - Aureus en or | Furius Crassipes 84 ap. JC - Denier en argent |
Elle semble donc par analogie être réservée à l'origine à un personnage important : échevin ou Schultheiss, magistrat juge...
Ce devait être le cas dans certaines régions de l'Alsace il y a fort longtemps.
La chaise curule constituée de deux cornes croisées, se confond souvent avec la croix de Saint André. Dans toute l'Alsace, du Nord au Sud, la chaise curule est présente dans le milieu rural.
On la rencontre également en abondance sur les pignons des riches maisons citadines.
Par la suite ses deux bras furent interprétés comme deux cornes représentant des symboles protecteurs contre les puissances maléfiques, et leur assemblage symbolisant l'union charnelle.
Relativement courant en Normandie, l'arbre de vie est rarissime en Alsace en tant qu'élément d'un pan de bois.
Cette forme archaïque de poutrage a des origines très anciennes.
Elle trouve ses racines dans la civilisation Indo-Européenne, et signifie source de vie. Pour les chrétiens, c'est un rappel biblique de la connaissance du bien et du mal. On le trouve plus fréquemment gravé dans l'argile des tuiles protectrices (Schutzziegel), ou peint sur le mobilier polychrome ou sur des panneaux de torchis.
Motif relativement fréquent sur des illustrations peintes ou gravées, le disque radié ou roue solaire est extrêmement rare lorsqu'il est intégré dans un colombage. En effet, le cercle est difficile à réaliser avec des pièces de bois. Les artisans de l'époque ont tout de même réussi ce tour de force, mais hélas, il en reste fort peu.
Depuis la nuit des temps, le cercle a toujours représenté le disque solaire. La croix intégrée à l'intérieur est un symbole chrétien par excellence. Associé au cercle, l'ensemble est à la fois un signe cosmique bénéfique pour les moissons, et un signe protecteur pour la maison et ceux qui y habitent.
A l'origine, le disque solaire radié représentait l'année solaire, donc le déroulement des saisons. Sa signification païenne a été reprise par le christianisme, pour qui la combinaison des deux symboles représente : celui du soleil, principe de vie et de lumière, et celui de la croix qui évoque le sacrifice du Christ.
D'origine hindoue, la svastika est l'un des plus anciens symboles de l'humanité. Depuis 3000 ans, on la retrouve dans toutes les civilisations du monde de la Chine jusqu'à l'Amérique. La svastika est une croix composée de quatre potences prenant la forme d'un Gamma grec en capital (г) d'où son appelation croix gammée.
Poterie, civilisation Minoenne (2700 - 1200 av. JC) Crête | Plaque de ceinture en bronze, civilisation Celte, Halstatt final (vers 500 av. JC). Tertre funéraire, forêt de Haguenau. Musée Historique, Haguenau, Alsace |
C'est le symbole des forces cosmiques, qui représente le soleil et la lumière, source de toute vie. En sanscrit, svasti signifie bonheur ou postérité conduisant au bien-être, donc un porte-bonheur.
Force mystique et protectrice, elle servait à attirer la chance, la félicité et le bonheur sur la maison, ses occupants et leurs biens.
L'Allemagne nazie l'a utilisée comme emblème, en lui enlevant complètement son côté positif : symbole de vie, d'amour, de perfection et d'infini.
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Svastika Dextrogyre: sens de rotation vers la droite | Svastika Senestrogyre ou Lévogyre: sens de rotation vers la gauche |
A l'origine, la signification variait selon le sens de rotation. En Alsace, elle est représentée dans les deux sens.
Le Mann est un élément du décor qui fait partie intégrante du poutrage. Malgré son caractère ornemental, il contribue à assurer la rigidité de l'ossature de la maison alsacienne.
A l'origine, le Mann n'avait qu'une fonction technique. Il s'agit avant tout d'une combinaison de poutres verticales et obliques, barrées d'horizontales. Le tout est chargé d'assurer un bon maintien de l'ensemble.
La combinaison du Mann rappelle d'une manière évidente la silhouette d'un homme jambes écartées, et bras levés au ciel. Partant des coins inférieurs gauches et droits, deux poutres représentant les jambes ou décharges se rejoignent sur le poteau vertical central au deux tiers de la hauteur de celui-ci qui constitue le tronc et la tête. Les bras ou aisseliers prennent naissance à mi-hauteur du poteau central, et s'appuient directement sur le haut des cuisses du Mann pour rejoindre les coins supérieurs gauche et droit.
A l'origine, le Mann était dépourvu de bras obliques, il ne s'agit encore que d'un embryon de Mann. Mais l'on distingue déjà nettement ses jambes qui rejoignent le tronc au deux tiers de sa hauteur.
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Le Mann primitif était pourvu d'une tête constituée par deux coins ouvragés, placée de part et d'autre du tronc au-dessus des entretoises supérieures. Ces coins peuvent être dépourvu de tout ornement ou être décorés de cœur ou être découpés de façon à imiter une double tête de coq.
La tête de coq est uniquement symbolique. En effet, le coq est l'animal qui par son chant matinal annonce la fin de la nuit et l'apparition du soleil. Il est logiquement celui qui fait fuir les sorcières, qui selon les croyances, mènent leur sabbat de minuit au point du jour, et s'enfuient à toute vitesse sur leur balais dès que le coq lance son chant.
Il arrive fréquemment que l'on utilise des K majuscules ou halbmann pour orner une façade.
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Sur certains pignons, on trouve souvent deux K majuscules ou demi-mann. L'un est placé d'un côté de la façade, et l'autre à l'envers de l'autre côté. On parle alors d'un Mann d'angle.
Comme le mann primitif, le demi-mann, à l'origine, était également dépourvu de bras oblique.
A l'origine, le cœur symbolisait le terre-mère, donc la fécondité. Il est également considéré comme le siège des passions. Il représente l'amour, la protection et l'union de l'homme et de la femme.
Les virgules de par leurs graphismes, rappellent les cornes que certains guerriers portaient jadis sur leur casque pour effrayer leurs adverssaires. Le cœur est lui-même représenté graphiquement par l'affrontement de deux cornes, qui constituent un symbole protecteur contre les puissances maléfiques.
Le cœur est également un motif porte-bonheur. Il a tenu une place de choix dans les arts et traditions populaires en alsace. C'est le motif ornemental le plus souvent représenté.
Le huit couché (liegende Acht) est fréquemment représenté en Alsace.
Sa forme spiralée et enroulée sur elle-même, en fait un symbole de l'infini.
Vers l'an 1000 av. JC, le concept d'infini appelé ‘'purna'' et signifiant plénitude apparaît dans les premiers textes hindoux. Il est repris tel quel en mathématique et en optique. Il a une valeur talismanique de souhait de longévité pour tous ceux dont il orne la maison.